L’argent à Ottawa, la misère à Québec!
Parution dans Le Quotidien | 18 décembre 2002
Québec, le 6 décembre 2002 – Pendant que le réseau de la santé et des services sociaux craque de partout, le gouvernement fédéral conserve son bas de laine et s’entête à vouloir décider pour les provinces. C’est à se demander si quelqu’un, quelque part, connaît la loi du gros bon sens.
Vu de l’extérieur, c’est pitoyable. C’est à croire que nos décideurs politiques oublient que l’enjeu principal est directement relié à la santé et au bien-être du vrai monde. Dans ce tumulte administratif, où donc se trouve le « citoyen », le « payeur de taxes », le « patient qui patiente patiemment »?
J’observe tous les jours la misère humaine. Je vois des milliers de familles qui accompagnent leur proche atteint de maladie mentale, je vois des gens essoufflés, épuisés physiquement et mentalement. Entre temps, le gouvernement fédéral dit vouloir notre bien. C’est la pensée magique… désolée, mais je cherche le rationnel, l’explication logique.
Pire encore, M. Romanow veut le bien-être des «aidants naturels». Il est prêt à prévoir leur sécurité économique et la sécurité d’emploi pour qu’ils puissent retourner à la maison pour offrir des services de soutien à domicile à leur proche atteint de maladie mentale. C’est à se demander si l’on vit sur la même planète…
Pendant ce temps, au Québec, nous nous investissons corps et âme, nous nous battons pour que les familles et les proches cessent d’être utilisés comme des dispensateurs de services. Ottawa dit reconnaître leurs besoins et leur fardeau, mais songe sérieusement à les surutiliser en assurant leur sécurité financière. L’argent est-il le remède à la détresse émotionnelle? L’argent permet-il aux gens d’apprendre à établir leurs limites, permet-il d’actualiser le potentiel des membres de l’entourage? À Ottawa peut-être, au Québec, la réponse est indéniablement NON!
Ici, on s’occupe d’améliorer la qualité de vie des membres de l’entourage qui ont un proche atteint de maladie mentale. Ici, on les considère comme des clients qui ont des besoins, comme des accompagnateurs qui ont des limites, et des partenaires dans l’organisation des services. Loin de nous l’idée de vouloir les exploiter.
La Fédération des familles et amis de la personne atteinte de maladie mentale regroupe 44 organismes communautaires qui soutiennent plus de 20 000 personnes annuellement. Nous attendons NOTRE argent du gouvernement fédéral pour bonifier les services de soutien à domicile, pour consolider et développer le financement de nos organismes communautaires qui marchent sur les genoux.
Que faut-il faire pour ramener les politiciens à la raison, pour faire comprendre que les provinces ont leurs particularités et leurs besoins, mais surtout leur jugement pour gérer les services de santé et les services sociaux. Les Québécois(es) qui accompagnent un proche atteint de maladie mentale n’iront pas revendiquer devant le Parlement à Ottawa, puisqu’ils sont épuisés. Ils n’ont pas d’énergie à gaspiller pour crier leur mécontentement à des gens qui ne veulent pas entendre.
En leur nom, je fais appel au gros bon sens de ceux et celles qui détiennent le pouvoir, car parmi les nôtres, il n’y a personne qui croit à la pensée magique et encore moins au Père Noël!
Hélène Fradet, directrice
Fédération des familles et amis de la
personne atteinte de maladie mentale (FFAPAMM)