Témoignage d’un père
« Personne ne peut s’imaginer à quel point la maladie mentale de ma fille m’a fait vivre l’humiliation. J’ai pensé pouvoir régler seul mon problème, je n’y arrivais pas. Heureusement pour moi, une association de familles et amis m’a secouru. »
Face au destin
En 1994, pendant que notre vie de famille se déroule comme pour la plupart des couples de notre âge, où nos deux enfants grandissent comme tous les autres, voilà qu’arrivent soudainement les premiers signes et symptômes d’une maladie mentale chez notre fille alors âgée de 17 ans.
Au tout début, mon épouse et moi avons cru à un accident de parcours pensant que cette mauvaise période allait être de courte durée et que notre fille s’en remettrait. Les mois ont passé et les rechutes se sont chargées de nous ramener dans une réalité que nous n’avions jamais imaginée : une maison imprégnée de stress et de tensions, des nuits d’insomnie interminables, des noeuds dans la gorge qui t’étouffent, le découragement qui t’envahit, la solitude… un mal à l’âme qui s’installe chez tous les membres de la famille.
Vivre avec l’imprévisible
Pour notre couple, ce fut le début d’un deuil cruel. Nous n’avions aucune idée où cette phase de notre vie allait nous amener. Ce qui était certain, c’est que nous allions devoir apprendre à vivre avec l’imprévisible, mais comment et à quel prix ? Avec son coeur de mère, ma femme a pris les devants pour livrer le combat afin de mieux comprendre la problématique. Comme pour la grande majorité des femmes, elle arrivait à exprimer ses émotions et était ouverte à demander de l’aide.
Mais moi le père, le conjoint, je n’arrivais pas à exprimer ma colère, mon désarroi, ma peine, mon humiliation. Je préférais fuir le noyau familial qui était devenu trop souffrant. Le temps que je consacrais habituellement à ma famille s’est transformé en de longues heures de travail, dans la pratique de sports, dans le bénévolat, des activités qui sont devenues mes échappatoires…
Apprendre à demander de l’aide
Pour l’homme que je suis et comme pour la plupart des hommes, je croyais être en mesure de gérer seul ma situation ; je n’avais pas besoin d’aide. Aujourd’hui, avec du recul, je peux vous affirmer qu’il s’agissait d’une grave erreur. Heureusement pour moi, la vie m’a un jour fait comprendre que demander de l’aide n’est pas un signe de faiblesse, mais au contraire, le meilleur moyen de surmonter une situation difficile.
Je me considère comme un homme privilégié d’avoir eu la chance de rencontrer des intervenants du Sillon, l’une des 49 asssociations-membres de CAP santé mentale. Grâce à cette ressource, ma femme et moi avons changé notre perspective face à la maladie mentale de notre fille. Nous avons appris à développer des modes de communication et nous avons eu la chance de rencontrer des gens qui vivent des situations similaires à la nôtre. Pouvoir partager, échanger, s’exprimer, ça peut paraître banal, sauf que ça provoque un bien-être incommensurable.
Des services de soutien à votre portée
Mon message s’adresse à toutes les personnes qui ont un proche atteint de maladie mentale, mais particulièrement aux hommes comme moi qui hésitent, s’isolent et refusent toute forme d’aide. Ne vous laissez pas enfoncer dans votre problème, les services de soutien sont à votre portée. Offrez-vous ce cadeau et donnez un coup de fil à l’association la plus près de chez vous. Les personnes qui s’y impliquent et qui y travaillent se démarquent par leur simplicité, leur respect et leur professionnalisme.
Grâce à eux et à ma volonté de vouloir remettre de l’équilibre dans ma vie personnelle et familiale, le mal de vivre que je ressentais s’est transformé en bien-être, voire en sérénité. Aujourd’hui, je tiens à vous encourager à effectuer la démarche que j’ai osé faire, puisque vous vous rendrez ainsi un service extraordinaire. Sans prétentions, je peux vous assurer que vous allez améliorer votre qualité de vie, et ce, malgré l’incontournable destin qu’est la maladie mentale.
Gaétan Turmel
Ambassadeur de la campagne de
sensibilisation 2004 de CAP santé mentale