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Le pouvoir de la reconnaissance et des forces de la personne en santé mentale

Quel sujet pourrait intéresser nos membres à l’approche du temps des fêtes, nous demandions-nous comme équipe? Ce temps de l’année qui est pour certains joyeux et pour d’autres, disons… plutôt stressant. Apprivoiser la gratitude nous est venu à l’esprit…

Quelle belle stratégie pour prendre soin de sa santé mentale, nous sommes-nous dit! Et de fils en aiguille, nous avons pensé à une approche qui fait du bien et qui favorise le chemin vers le rétablissement pour une personne qui vit avec un trouble de santé mentale, une approche centrée sur les forces et sur la reconnaissance.

Mais comment faire pour mettre en lumière les forces de mon proche si je vois principalement sa souffrance et si je porte sur mes épaules le projet de le rendre mieux? Le rôle d’accompagnateur vient souvent parsemé de pièges cachés qui, si je ne m’y arrête pas, risquent de me précipiter dans une spirale dévastatrice pour tenter de sortir mon être cher de son malheur. Le premier piège, c’est d’oublier d’être bienveillant envers soi-même dans son rôle d’accompagnateur et d’investir toute son énergie dans l’être cher.

Qui parmi nous ne s’est jamais senti impuissant devant la souffrance de l’autre? Qui n’a jamais ressenti de culpabilité, de colère, de honte ou de responsabilité face aux difficultés de son proche qui vit avec un trouble de santé mentale? Impuissant devant cette souffrance, impuissant face à la maladie, impuissant devant le rythme de l’autre, impuissant devant sa différence qui éveille des malaises en soi, impuissant devant ce que nous pouvons réellement faire pour aider notre personne. Sachant que le seul pouvoir que nous ayons est celui de nous prendre en charge et nous changer nous-mêmes, il est inévitable que dans toute relation d’aide, nous fassions face à la plus grande des impuissances: celle de prendre l’autre en charge et le changer.

Ce sentiment d’impuissance est normal.

Et s’en défendre aussi. Toutefois, en relation, une défensive en attire une autre et malheureusement, nous attire le contraire du bien-être que nous recherchons. Prendre réellement soin de soi, c’est accueillir cette émotion désagréable ainsi que toutes les autres qui s’éveillent en soi sans jugement, avec empathie et avec sensibilité.

Eh oui, là et seulement là, réside le pouvoir sur soi. À défaut d’accueillir nos émotions désagréables afin de pouvoir en prendre soin, nous risquons de glisser dans le contrôle, dans la prise en charge excessive et dans le projet de changer l’autre pour tenter de moins souffrir. Et si nous n’avons pas conscience de ce processus, on devient piégé dans ce cycle.

La spirale de ce cycle est lourde à porter, autant pour soi que pour le proche qui vit avec un trouble de santé mentale. Alors pour les fêtes, pourquoi ne pas prendre un recul et essayer de lâcher prise sur ce que nous ne pouvons pas changer? Ça, c’est le plus beau cadeau que vous pouvez vous offrir et c’est le début de la route pour retrouver votre liberté et votre bien-être.

Nous avons le pouvoir de changer nos pensées et notre façon d’aborder le trouble de santé mentale de notre proche. Pour nous aider à toucher l’espoir, inspirons-nous de l’approche par les forces mise au point par Charles Rapp et Rick Gosha de l’Université du Kansas.

« L’approche par les forces repose sur l’idée que chaque personne peut effectuer des changements dans sa vie et qu’elle possède une expertise sur elle-même qui lui permet de résoudre ses problèmes et d’avancer dans son projet de vie. »

J’entends déjà des gens dire, et je m’inclus, «Ben voyons donc, ils ne connaissent pas mon proche eux. Il est bien trop malade pour savoir ce qui est bon pour lui»! On voit souvent nos proches comme des personnes affectées par une maladie qui leur enlève toute leur compétence. Tentons de changer cette pensée paralysante pour nous-mêmes et pour notre proche.

L’approche par les forces repose sur six principes qui misent sur la recherche de projet de vie, sur les talents et les capacités des personnes, ainsi que sur les ressources et les occasions disponibles dans leur environnement.

Mais que puis-je changer?

  1. Mettre l’accent sur les forces de l’individu plutôt que les déficits;
  2. Croire et savoir que les personnes qui vivent avec des problèmes de santé mentale importants sont capables de transformer leur vie;
  3. Accepter que la personne usagère soit le maitre d’œuvre de sa vie et du processus d’intervention;
  4. Reconnaître que le lien relationnel est primordial pour la co-construction des interventions;
  5. Favoriser les interventions et les interactions dans la communauté, à l’extérieur de l’institution ou de l’hôpital;
  6. Renforcer les forces de l’environnement de la personne et le rôle de la communauté en tant qu’oasis de ressources.

Sans nier la réalité de la maladie, prendre un moment chaque jour pour relever une force chez notre proche peut faire une grande différence. Lors d’une formation, une dame qui s’est relevée d’une dépression majeure nous partageait l’effort presque inhumain qu’elle devait fournir pour accomplir une toute petite tâche. Lorsque sa famille s’est mise à reconnaitre ses efforts plutôt que miser sur ses difficultés, comme sa tendance à passer sa journée au lit, elle dit que son expérience intérieure a changé. En faisant confiance à notre proche et en croyant en ses possibilités, on favorise le bien-être de chacun tout en respectant sa différence.

En changeant notre propre regard, sur nous-mêmes et sur l’autre, on y découvre un nouveau chemin. Pour vous aider à vous prioriser et à prendre soin de vous, n’hésitez pas à participer à notre atelier sur la pleine conscience, c’est une belle piste pour conscientiser vos pensées et ainsi, recontacter votre vrai pouvoir.

 

Source : Julie Clément, conseillère chez les Amis de la santé mentale. 2022. Affaires de famille, Vol. 43 No. 4, édition des Fêtes 2022, pages 4-5.

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